Figures de la révolution africaine

De Kenyatta à Sankara

Jomo Kenyatta, Aimé Césaire, Ruben Um Nyobè, Frantz Fanon, Patrice Lumumba, Kwame Nkrumah, Malcolm X, Mehdi Ben Barka, Amílcar Cabral, Thomas Sankara… Longtemps regardés avec dédain par ceux qui, depuis les années 1980, décrétèrent la mort du tiers-mondisme et le triomphe du néolibéralisme, ces noms reviennent à l’ordre du jour. Avec l’atmosphère de révolte que l’on sent monter aux quatre coins du monde, ces figures majeures de la libération africaine suscitent un intérêt croissant auprès des nouvelles générations.
Refusant d’en faire de simples icônes, Saïd Bouamama redonne corps et chair à ces penseurs de premier plan qui furent aussi des hommes d’action. Leurs vies rappellent en effet que la bataille pour la libération, la justice et l’égalité n’est pas qu’une affaire de concepts et de théories : c’est aussi une guerre, où l’on se fourvoie parfois et dans laquelle certains se sacrifient. S’il ne cache pas son admiration pour ces figures rebelles, dont la plupart moururent effectivement au combat, Saïd Bouamama n’en fait pas des martyrs absolus : la pensée en action est toujours située, incertaine, inachevée.
C’est pourquoi ce livre s’attache, avec beaucoup de pédagogie, à inscrire ces parcours dans leurs contextes sociaux, géographiques et historiques. On comprend mieux dès lors comment ces hommes, qui ne vécurent pas tous sur le continent africain, mais furent tous confrontés à l’acharnement des puissances impériales, cherchèrent les armes pour sortir l’Afrique de la nuit coloniale et faire émerger une nouvelle universalité.
À l’heure où l’on se demande comment avoir prise sur le monde, ce portrait politique collectif rappelle qu’il a toujours été possible, hier comme aujourd’hui, de changer le cours des choses.

Saïd Bouamama est sociologue et militant associatif. Engagé professionnellement et personnellement dans les luttes d’émancipation dans toutes leurs dimensions, il est notamment l’auteur de Les Discriminations racistes : une arme de division massive (L’Harmattan, 2010) et La France. Autopsie d’un mythe national (Larousse, 2008). Avec le Collectif Manouchian dont il est un des animateurs, il a établi un Dictionnaire des dominations de sexe, de race, de classe (Syllepse, 2012).

 

Ce titre est maintenant disponible au format poche aux Éditions La Découverte.

ISBN 9782355220371
Parution
Nb de pages 300
Dimensions 140 x 205 mm

Extraits Presse

Dans cet ouvrage, l’auteur nous présente le parcours des grands leaders africains qui se sont attachés à une Afrique affranchie de toute domination. S’ils ne vivaient pas tous sur ce continent, ils ont voulu que celui-ci deviennent l’égal des autres au plan économique et diplomatique, à un moment où les Occidentaux cherchaient souvent à installer une sorte de néocolonialisme économique dans leurs anciennes colonies. Le livre a aussi le mérite de faire découvrir (ou redécouvrir) quelques leaders souvent éclipsés par de « grosses pointures » tel Lumumba, mais qui ont oeuvré parfois plus en coulisse mais avec aussi parfois plus de succès.

Lectures - 01/09/2014

Lumumba, Césaire, Fanon, Nkrumah, Ben Barka, Cabral, Sankara, Kenyatta… Ces noms furent longtemps assimilés au « tiers-mondisme » et dédaignés par ceux qui en décrétèrent la mort au cours des très néolibérales années 1980. Ils suscitent aujourd’hui un engouement et une curiosité croissants chez les jeunes générations, à l’heure des printemps arabes et des révoltes en germe aux quatre coins du globe. Sans vouloir en faire des icônes, le sociologue Saïd Bouamama explore le parcours de ces « figures rebelles » d’une « pensée en action » – en les replaçant rigoureusement dans leur contexte socio-historique. Celle de la libération, toujours en marche, du Sud.

Politis - 13/03/2014

Les dix hommes dont sont proposés ici les portraits (Ruben Um Nyobè, Amilcar Cabral, Jomo Kenyatta, Patrice Lumumba…) sont des « penseurs combattants » qui cherchent entre les années 1940 et 1980 à libérer l’Afrique. Tous sont devenus des symboles, et des sources d’inspiration pour les chercheurs des études postcoloniales. Saïd Bouamama, sociologue et militant associatif, met en avant plusieurs thématiques : le passage du réformisme juridique à la légitimation de la violence, la continuité entre l’anticolonialisme et la lutte anti-impérialisme, la distinction entre indépendance et décolonisation, le rôle de la bourgeoisie nationale, dont beaucoup de ces révolutionnaires étaient des représentants. Bouamama ne verse pas dans l’admiration niaise et expose échecs, revirements et doutes de ces hommes qui n’ont jamais cessé de renouveler le sens et les perspectives de leurs engagements, en interrogeant les concepts du culturalisme, du « socialisme sans lutte des classes », du tribalisme ou encore du communisme.

Jules Crétois - Le Monde diplomatique - 01/04/2014

À l’heure où la France joue les gendarmes en Afrique, une piqûre de rappel sur les grandes figures de la décolonisation ne peut pas faire de mal. À la manœuvre, le sociologue engagé Saïd Bouamama, membre de la première heure des Indigènes de la République, et coauteur avec le rappeur Saïdou du pamphlet Nique la France, en 2010. Dans ce livre, qui a valu aux deux hommes (ô ironie !) des poursuites en justice pour injures publiques à caractère racial, le militant roubaisien s’en prenant frontalement aux discriminations dont souffrent les immigrés en France, héritage selon lui du passé colonial. D’inspiration marxiste, ces Figures tendent à raviver la flamme du tiers mondisme, symbole oublié de la lutte contre suprématie capitaliste. En réexaminant les parcours politiques d’une dizaine de révolutionnaires africains, dont Ruben Um Nyobe et Patrice Lumumba, Saïd Bouamama médite le legs spirituel laisse par les grands acteurs de la décolonisation, à la recherche de pistes pour imaginer l’avenir.

Émile Rabaté - Libération - 20/02/2014

N’en déplaise à un ancien président de la République, ce n’est pas l’Afrique qui ne serait pas entrée dans l’histoire, mais surtout le reste du monde qui persiste à l’ignorer. La preuve avec cette série de dix portraits proposés par le sociologue Saïd Bouamama concernant des figures qui ont incarné autant de tentatives différentes pour permettre aux peuples de ce continent de se réapproprier leur histoire. […] Un ouvrage clair et vivant, comportant également de brèves synthèses sur le contexte politique international des différentes périodes et qui en fait un excellent cours de rattrapage en histoire, autant qu’un guide pour l’action politique présente.

Igor Martinache - Alternatives économiques - 01/04/2014

Table des matières

Introduction. Un autre avenir 
Sous les cendres de la contre-révolution néolibérale
Des penseurs combattants
État, nation, classe, culture
Qu’est-ce que l’« Afrique » ?
I / Reformer le colonialisme ou l’abattre ? (1945-1954)
1. Esclavage, conquête et colonisation : la résistance en héritage
Des résistances des esclaves…
… à celles des colonisés
Les diasporas noires africaines en résistance
Au cœur des métropoles colonialistes
La gauche européenne et les colonies
2. Quelle décolonisation ?
Quand le socle colonial se fissure
Le droit, épine dorsale du système international ?
Des puissances coloniales affaiblies
Un vent de liberté souffle sur l’Asie
La guerre froide : un frein à la décolonisation de l’Afrique
Le Royaume-Uni : un self-government mou… et à long terme
La France : l’autonomie contre l’indépendance
Portugal, Espagne, Belgique : le règne de l’immobilisme
3. Jomo Kenyatta
Du village à l’engagement politique
Les années londoniennes : résistance culturelle, libération nationale, engagement panafricain
Un « héros » de retour au pays
L’insurrection « Mau Mau » : la rupture
« Our man in Kenya »
4. Aimé Césaire
La négritude
L’engagement
Communisme et anticolonialisme : de la départementalisation en Martinique…
… au Discours sur le colonialisme
Contre le « fraternalisme »
5. Ruben Um Nyobè
La force du droit international : « le Cameroun est un pays libre » !
Du syndicalisme au nationalisme
Ne pas agir « par le sommet »
Émancipation sociale et indépendance nationale
L’enjeu de la réunification
L’arme du droit
Unité et construction nationale
La question de la violence
II / Le droit de légitime violence (1954-1962)
6. Diên Biên Phù, Bandung, Suez. Le temps de l’espoir
L’Afrique au cœur de la guerre froide
De Diên Biên Phù à Bandung
Crise de Suez : quelle indépendance économique ?
Lâcher l’Asie, garder l’Afrique
La « Françafrique », ou comment vider l’indépendance de sa substance
L’effervescence panafricaine
La violence légitime
7. Frantz Fanon
La décérébralisation coloniale du peuple
Le colonialisme comme système
Violence d’oppression, violence de libération
« Pseudo-indépendances » et « bourgeoisie nationale »
Une approche matérialiste du panafricanisme
8. Patrice Lumumba
« L’empire du silence »
Les illusions coloniales de l’élite noire
Rencontres militantes
Courage et naïveté
Panafricanisme, unité nationale et indépendance économique
La trahison de l’ONU
« Martyr de la révolution mondiale »
9. Kwame Nkrumah
Du village à Philadelphie et New York
Le panafricanisme contre le néocolonialisme
S’émanciper sans violence ?
Un socialisme sans lutte des classes ?
À l’épreuve du pouvoir
III / De l’anticolonialisme à l’anti-impérialisme (1962-1975)
10. Un continent à l’assaut du ciel
Entre la « détente »…
… et l’affrontement sino-soviétique
L’essor des solidarités anticoloniales de la jeunesse
Un « changement de route »
Les limites de l’OUA
La Tricontinentale
Contre-offensives impérialistes
11. Malcolm X
Du nègre blanc au musulman noir
La rupture libératrice
Assassinat d’un internationaliste
12. Mehdi Ben Barka
« La dynamo du nouveau Maroc »
« Le tracteur et l’esprit coopératif »
Les illusions d’une lutte en vase clos
Le « commis-voyageur de la révolution »
Le temps des assassinats
13. Amílcar Cabral
La réafricanisation des esprits
Villes et campagnes
Expériences locales…
… pour une révolution (vraiment) mondiale
Le suicide de la petite bourgeoisie
La culture est une arme
Dans les zones libérées : faire la révolution en combattant
14. Thomas Sankara
Un militaire insoumis
« Malheur à ceux qui bâillonnent le peuple »
« Oser inventer l’avenir »
De nouveaux combats : l’écologie, le féminisme, la dette
« On peut tuer un homme mais pas des idées »
Notes.