La vérité en ruines

Manifeste pour une architecture forensique

Comment, dans un paysage politique en ruines, reconstituer la vérité des faits ? La réponse d’Eyal Weizman tient en une formule-programme: « l’architecture forensique ». Approche novatrice au carrefour de plusieurs disciplines, cette sorte d’architecture se soucie moins de construire des bâtiments que d’analyser des traces que porte le bâti afin de rétablir des vérités menacées. Impacts de balles, trous de missiles, ombres projetées sur les murs de corps annihilés par le souffle d’une explosion: l’architecture forensique consiste à faire parler ces indices.
Si elle mobilise à cette fin des techniques en partie héritées de la médecine légale et de la police scientifique, c’est en les retournant contre la violence d’État, ses dénis et ses « fake news ». Il s’agit donc d’une « contre-forensique » qui tente de se réapproprier les moyens de la preuve dans un contexte d’inégalité structurelle d’accès aux moyens de la manifestation de la vérité.
Au fil des pages, cet ouvrage illustré offre un panorama saisissant des champs d’application de cette démarche, depuis le cas des frappes de drone au Pakistan, en Afghanistan et à Gaza, jusqu’à celui de la prison secrète de Saidnaya en Syrie, en passant par le camp de Staro Sajmište, dans la région de Belgrade.

Eyal Weizman, né en 1970 à Haïfa, est depuis 2011 le directeur du laboratoire Forensic Architecture à l’Université Goldsmiths (Londres) et l’auteur de nombreux livres, dont À travers les murs. L’architecture de la nouvelle guerre urbaine, La Fabrique, Paris, 2008.

Version Papier 24 €
Version Numérique 18.99 €
ISBN 9782355221446
ISBN numérique 9782355221798
Parution
Nb de pages 192
Dimensions 170 x 235 mm

Actualités

Extraits Presse

Cette « épistémologie des ténèbres » a l’ambition immense de nous aider à contrôler ceux qui nous contrôlent, surveiller les dispositifs de surveillance, compléter le travail que ne fait pas toujours la justice. Il s’agit donc d’inverser ce « regard forensique » […] afin que l’architecture et le bâti soient un catalyseur de témoignages et « fonctionnent comme des médias », enregistrant l’environnement, stockant les données, diffusant les traces.

François Cusset - Beaux Arts Magazine - 01/03/2021

L’objectif, créer un nouveau régime de preuves construites avec les techniques de l’architecture : chercher des preuves visibles dans l’urbanisme et les bâtiments, mais aussi se servir de la spatialisation, de maquettes, pour faire advenir la vérité. La démarche est scientifique, elle est aussi politique, militante, activiste : il s’agit de faire apparaître les mensonges et la domination exercés par les États.

Raphaël Bourgois - AOC - 06/03/2021

Eyal Weizman est l’inventeur d’une discipline et d’une manière de faire de la politique. […] L’idée paraît simple : utiliser les traces laissées sur le paysage et les bâtiments par des crimes, afin d’instruire ces affaires et de les faire juger. Cette « architecture légale » ne construit donc rien – tout comme la médecine légale ne soigne personne –, elle est un outil de l’enquête judiciaire. Détournant les principes d’une pratique qui était jusque-là réservée aux experts des assurances, Eyal Weizman leur donne d’autres objectifs : la discipline doit désormais servir à élucider des crimes d’Etat, à établir les méfaits que des puissances cherchent à dissimuler ou minimiser. Ce sera une arme pour la défense des plus faibles. La Vérité en ruines  a l’intérêt de former un« manifeste » qui pose les principes à la fois philosophiques et techniques de la discipline. Et c’est absolument passionnant. Car ce livre offre, en creux, une réflexion très fertile sur l’architecture.

Xavier De La Porte - L'Obs - 22/04/2021

Comment enquêter sur les mensonges d’État à l’heure où les brouillages de la post-vérité s’ajoutent aux mensonges officiels ? Eyal Weizman, fondateur du collectif Forensic Architecture, répond, empiriquement et théoriquement, dans un livre manifeste : La Vérité en ruines.

Joseph Confavreux - Mediapart - 03/04/2021

Un livre aux accents de manifeste qui parait au moment où les méthodes d’enquête multimédia développées par son auteur […] essaiment dans les médias du monde entier. Les reconstitutions de scènes de violence policière ou de crimes d’État que produisent régulièrement les sites du New York Times, du Washington Post, de la BBC, du Monde, de Mediapart, reposent sur les mêmes procédés de collecte et d’analyse de données en source ouverte que celles que Forensic Archiecture promeut depuis plus de dix ans. […] Une exploitation qui requiert un temps et une énergie considérables, mais qui constitue une arme redoutable contre les mensonges d’État.

Isabelle Regnier - Le Monde - 27/04/2021

Table des matières

Préface
Au seuil de la détectabilité
Positivisme négatif
Vers une architecture forensique
L’œil du drone
Extraterritorialisation visuelle
Focus. Patterns : les configurations de frappes de drones
Dévoiler la réalité
L’architecture de la mémoire
Qu’est-ce que l’architecture forensique ?
Focus. Fissures : lignes de moindre résistance
Experts architecturaux en zones de conflit
Focus. Staro Sajmište : l’horizon inversé
Forensis
Contre-forensique
Focus. Qui frappe sur notre toit ?
Objectivité engagée
Focus. Phosphore blanc
Le tournant forensique
L’ère du témoin
Focus. Saidnaya : dans les entrailles d’un centre de torture syrien
L’esthétique forensique
L’espace des images
Focus. Avant et après
Focus. La localisation des frappes aériennes étatsuniennes et russes en Syrie
Focus. Abu Rahma : de la vidéo à la modélisation virtuelle
Configurations
Focus. Contre-configurations
Champs de causalité
Focus. La violence environnementale au Guatemala
Focus. Le paysage contre l’État
La vérité en ruines
La vérification ouverte
L’épistémologie des ténèbres
Polyperspectives
Savoir contaminé
Les communs esthétiques
Remerciements
Postface. Qu’est-ce qu’un seuil ?par Grégoire Chamayou
Seuils phénoménologiques
Seuils normatifs
Seuils ontologiques.